Imaginons ensemble, une pièce sombre, voûtée, sans décoration, où un grand album en forme de missel relié de velours rouge, à ferrures antiques, repose, solitaire, sur un lutrin éclairé par un unique flambeau.

Rêvons ensemble, que ce grand album soit un recueil d’illustrations. Dessins de villes, d’instantanés de vie, où en regard de chaque illustration, écrit de la main des hommes, des récits vrais et moins vrais. Livre précieux, que l’on Feuillette, avec les yeux émerveillés, d’un enfant d’autrefois devant de belles images.

Au hasard, nous tournerons ses pages. Nous arrêtant seulement devant une illustration, selon ses couleurs, nos envies et au gré du vent.

Si le lecteur, bienveillant ( et nous le savons bienveillant), possède une âme quelque peu d’artiste, il comprendra. Des descentes dans le temps à un endroit, puis des remontées dans d’autres parties de ce temps, en passant par des lignes droites, sans oublier les courbes et les doubles boucles de ce même temps - Pour l’espace, pareil - Voilà ce qui attend notre bienveillant lecteur. Lequel, rien ne l’empêche de donner son très estimable avis. Nous le remercions d’avance et lui souhaitons d’agréables voyages.

mardi 6 mars 2012

Jacob Van Maerlant


Pendant son règne, Charlemagne ne perdit pas de vue la culture de la langue vulgaire, il fit réunir toutes les anciennes poésies. Ses tentatives cependant ne résistèrent pas à la grande tendance littéraire de l’époque. La religion et la civilisation latine poussaient fortement à l’étude du latin. Rapidement, les Lettrés négligèrent les langues nationales et le latin devint bientôt la langue universelle des sciences et de la diplomatie.

Mais vers le XIIIe siècle, temps où les grandes communes du nord prirent une plus large existence, la langue vulgaire repris sa place dans l’administration locale, elle remplaça les écrits rédigés jusque là en latin.

Ce siècle était le siècle de Van Maerlant. Un grand nombre d’ouvrages de lecture, des morceaux de poésie et des romans chevaleresques étaient répandus en langue vulgaire. Cependant les livres sérieux, les hautes questions scientifiques, les dissertations sur les arts et les sciences, l’histoire et la médecine étaient traitées exclusivement en latin.

Devant ce vide, Van Maerlant abandonna le latin comme langue d’écriture.
Il se décida à devenir utile en écrivant dans sa langue, le flamand. Il lutta pour que les connaissances profitables au plus grand nombre soient répandues autant que possible. Il souhaita que les sciences soient débarrassées de la plus grande entrave, celle qui obligeait l’étude d’une langue étrangère ou morte. En flamand, il composa différents grands ouvrages sur les sujets les plus importants. Il publia d’abord une traduction de la Bible ( la Bible rimée ( RymBybel) en 1270), une histoire universelle, une histoire naturelle et un traité sur les fondements du droit public et privé. Ces ouvrages formaient une encyclopédie assez complète pour ce temps.

Dans le genre religieux, d’autres écrits s’ajouteront encore : une vie de St François, les miracles de Notre-Dame…

Quelques œuvres en proses verront aussi le jour sous sa plume.

Le poème le plus curieux et le plus beau dans le genre poétique, est sans conteste, la satyre, dite  Wapen Martin, un dialogue entre Jacques et Martin sur les questions sociales du temps. Les idées les plus libres et les plus élevées sont rendues dans ce texte avec beaucoup de franchise. La versification élégante de ce poème, sa richesse en figures poétiques, sa pureté et sa souplesse dans la diction, suffirait pour placer Van Maerlant au premier rang des poètes de son siècle. Un autre œuvre, l’ode intitulée du Pays d’Outremer est une composition audacieuse. Le poète y fait un appel vigoureux au monde chrétien pour marcher à la conquête et à la délivrance de la Terre-Sainte. Mais surtout, en cette occasion, il ne ménage pas la conduite craintive de quelques chefs de la chrétienté.

Il connaît les défauts de son siècle, il les poursuit et les flétrit de son verbe acerbe et mordant.

Considéré comme l’écrivain le plus grave de son temps, ses écrits en langue vulgaire eurent une influence immense.


L’origine et la carrière primitive de Van Maerlant sont couvertes d’un épais nuage ; le lieu de sa naissance est ignoré. Nous ne connaissons de cette époque de sa vie que quelques indices échappés à sa plume et éparpillés dans ses nombreux écrits. Au commencement de la vie de St François, il dit qu’il est Flamand, ailleurs qu’il est feudataire du duc de Brabant.
Il résida quelques temps à Maerlant, où il composa un poème sur la guerre de Troie. Son miroir historique fut dédié au comte de Hollande, Florent V, et la vie de Saint-François écrite à la prière de ses amis d’Utrecht.
Vers la fin de sa vie, il remplit l’office de greffier de la ville de Damme et y mourut vers l’an 1300. Enterré dans l’église paroissiale, son tombeau fut orné d’une pierre sépulcrale.
Après sa mort, ses livres furent traduits en latin et en français, démontrant ainsi l’importance de son œuvre. Au 18e siècle beaucoup de ses livres étaient encore imprimés.

Pour conserver la mémoire du célèbre greffier et de l’illustre poète, lors de la reconstruction de l’Hôtel-de-ville de Damme au XIVe siècle, on décora les poutres de la grande salle de sculptures en son honneur. L’une représente Van Maerlant, écrivant, assis devant un pupitre ; l’autre, le roi David, poète, pinçant les cordes d’une harpe.

En 1839, la société d’émulation pour l’étude de l’histoire et les antiquités de Flandre Occidentale, entreprit des recherches pour retrouver la tombe de Van Maerlant. Malheureusement sa pierre sépulcrale, vendue, en 1829, à un marbrier, n’existait plus. Cette pierre était de grande dimension. Dans son contour, cette pierre comportait une inscription en lettres gothiques. En haut vers le milieu se trouvait gravé un miroir, qui représentait en fait un pupitre ancien sur lequel on avait dessiné un livre, un hibou, et au dessous les mots Uilenspieghel.

Après avoir acquis la triste certitude de la destruction de la pierre, le comité directeur de la Société d’Emulation résolut de provoquer l’érection d’un nouveau monument à la mémoire du père de tous les poètes flamands.

De vader
Der dietscher dichters allegaders

Dans l’appel que ce comité fit , les mérites de Van Maerlant furent très bien appréciés : « On doit bien se représenter, que ce monument n’est pas seulement un hommage à Van Maerlant comme grand poète, mais comme celui qui a ouvert une route nouvelle à l’intelligence…, et qui peut, à juste titre, être proclamé le père de la littérature…, l’écrivain qui répandit la sagesse et les lumières par ses écrits à une époque où une grande partie de l’Europe était encore plongée dans les ténèbres… »

Troisième partie : Thyl Uilenspiegel

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire